Ski Turkey

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Ski Turquie: de la neige, du Raki et des loups...

Invités en Turquie avec Romain Raisson, Marco Siffredi et Simon Favier pour les besoins d'une compétition locale, comme la dure vie de pro-rideur l'impose parfois, nous voilà embarqués dans un trip aux portes de l'Orient, affolés par des mètres de neige fraîche. Mais pourquoi donc jamais rien ne se passe comme prévu ?

TEXTE : BRUNO COMPAGNET - PHOTOS : SEB LÉON, Skieur Magazine

Turkey

ski turkey

L'aéroport d'Istanbul est grand, d'un modernisme froid, a des années-lumière de l'image à la Midnight Express que je m'en étais faite : au plafond, pas de lourds ventilateurs tournant lentement dans la moiteur d'un jour, découpant en contre-jour de grandes volutes de fumée de cigarette... Après avoir récupéré presque tous nos bagages (Seb ne retrouvera ses skis qu'au retour...), nous voilà déboulant dans le hall principal où nous attendent nos deux contacts : Huzun snowboardeur musicien et Volcano, le driver version moderne et turque de Jacouille la Fripouille qui égaiera le voyage de ses "OK !" tonitruants.

Le Sultan Humet Hôt grande mosquée blanche (à peu près aussi nombreuses que les boulangeries dans une ville française). Des mosquées mais aussi des églises, et souvent les deux à la fois d'ailleurs, en fonction du siècle où vous avez la chance de passer... Car Istanbul est l'une des villes les plus anciennes de notre civilisation, d'abord Byzance puis Constantinople, une ville qui a aussi été pendant près de 1000 ans la capitale de l'empire chrétien. Mais bon, à l'heure où il fait faim, c'est davantage la rencontre avec la nourriture locale qui fut des plus agréables. Et c'est tout naturellement dans un bar à narguilé que nous avons fini la soirée en alternant les tournées de thé a la pomme et les bagganious, mâchonnant un de ces narguilés géants, savamment entretenu par le «serveur»...

Direction le Sud

Le lendemain, il pleut. Après avoir acheté des chaînes, nous traçons vers le Sud, direction Bursa, où un ferry sur la mer de Marmara nous évite un grand détour. Huzun nous fait remarquer les ravages du dernier tremblement de terre où, à la tombée du jour, voir ces maisons et immeubles effondrés, nous rappelle que la lucarne sur le monde de la télévision déforme passablement la vision de la réalité... Alors qu'à 20 heures, on s'intéresse au dernier défilé de mode de choses inachetables car trop chères et immettables car trop moches, des milliers de gens vont à nouveau passer un hiver dans des camps de tentes de la Croix Rouge datant non plus de Constantinople, mais de Mathusalem !

C'est le Monte Carlo ou quoi ?

Les compétences de Volcano en matière de conduit étant plus que limitées, c'est Seb qui prend le volant. La neige tombe comme dans une vidéo américaine: il faut donc chaîner. La route monte progressivement, bordée d'arbres magnifiques chargés de neige. A la vue de ce qui tombe dans la lumière des phares, on commence à s'enflammer. Quand tu voyages, la peuf, c'est un peu la cerise sur le gâteau et là, visiblement, on va y avoir droit ! L'excitation nous gagne : spéculations sur le ride et crises de rires sous l'oeil inquiet de Volcano, pour qui la neige n'est qu'une source d'ennuis et qui ne comprend définitivement pas les raisons d'une telle joie. Arrivés de nuit à la station Uladag, il nous faut encore attendre, pour être montés à dos de rattracks jusqu'à l'hôtel situé en haut des pistes : le rêve ! Si l'ambiance cheminée et boiseries ne nous gène pas, un peu plus de dépaysement ne nous aurait pas déplu. Dehors, ça en pose grave...

Première neige

Comme partout autour du monde, c'est une envie de pisser de tous les diables qui me sort du lit au petit matin. Un rapide coup d'œil à la fenêtre me rassure: cette neige n'était pas un rêve... Et me voilà reparti à rider la couette pour deux bonnes heures avant le petit déj, forcément à la turque : olives noires ou vertes, concombre, tomates, feta, fromage, omelette, thé ou café bien sûr, pain, beurre, confitures variées... Il continue à faire un temps à ne pas mettre un Suédois dehors. Heureusement qu'une partie du domaine se situe dans une forêt et offre de gentils runs sinon, impossible d'y voir à plus d'un mètre... Mais nos obligations nous forcent à déjà quitter Oludag pour Kartalkaya, malgré les avertissements de Huzun : la circulation peut être bloquée à tout moment, la neige étant descendue très bas dans les vallées. Volcano est vert de voir Marco s'emparer du volant pour faire rugir le moteur...

Sur la route

«C'est rien ! Juste un petit coup sur le pare-chocs.» On vient de quitter la route. Heureusement que les bordures sont gavées de neige pour amortir le choc ! Tout le monde est rassuré, le radiateur n'a rien, on peut repartir. Il faut dire qu'une panne, de nuit, dans les montagnes turques n'est pas forcément la bienvenue... Pour fêter ça, Seb débouche une bouteille de raki et prend la place de Marco qui va dormir sur les sacs, à l'arrière du minibus. C'est lui qui nous drivera, freeride style, et de main de maître, au milieu de ce bordel indescriptible : camions en travers, voitures à deux à l'heure, piétons ahuris ou en colère et finalement un gros bouchon. Bref, on tripe... Bon an, mal an, on finit par arriver sur la petite route déserte qui rejoint Kartakaya. Perdue au milieu des collines et d'une immense forêt, la route s'élève sous la pleine lune. Ayant pris le volant, j'éteins les phares un bon moment pour profiter de la lumière naturelle. Au feeling. Alors que je rêvassais en suivant du regard les jolis mouvements de la neige que le vent s'amuse à faire courir sur la route, cinq loups traversèrent la route à une vingtaine de mètres de nous. Heureusement, Simon avait sa caméra et eut le réflexe de filmer la scène... Que le vainqueur gagne ! Le lendemain matin, le bus n'a pas apprécié le froid glacial de la nuit. En rade. Finalement, on nous drive jusqu'à la station de Kartakaya. Deux gros hôtels, une discothèque et un domaine qui a l'air assez flat (mais bon, on commence à s'y faire). Le vent s'est levé et il fait grand beau, malgré un froid sibérien, la vue sur les vallées et les plateaux qui nous entourent est d'une beauté irréelle, parsemée ici ou là de magnifiques pins. On ride jusqu'à la fermeture avant de se plier aux formalités de l'inscription à la compète où l'on ne peut gagner la voiture qui échoit au vainqueur qui doit être Turc. Normal. Compète sans intérêt mais fête de premier ordre, nous voila accompagnés d'une bande de minettes pet farouches semblant avoir oublié toute retenuE malgré la surveillance rapprochée de leur; copains. Le lendemain, je me lève avec une solide gueule de bois, réveille Seb et les autres. II fait beau, la neige est là, rien de tel qu'une bonne journée de ride pour se mettre à niveau. Le vent' a joué avec la neige pour sculpter des forme; incroyables dans les arbres de la forêt où nous ridons. Même si c'est assez flat, on se gave. Toujours plus loin

Simon Favier et Romain Raisson doivent rentre en France pour honorer de leur présence la première date du Snow and DJ Tour... Après quelques discussions avec Salomon, mon sponsor, il apparaît dommage de rentrer avec de telles conditions de neige. Seb, Marco et mo décidons de poursuivre le voyage vers l'Est direction Erzurum via Ankara. A la sortie de l'aéroport, l'ambiance change carrément de celle d'Istanbul : lignes barbelées, miradors barrages militaires et contrôles de police su la route. Le problème kurde, sûrement. Ankara n'ayant aucun intérêt architectural, nous ne traînons pas et filons direct sur la station de Palaudohum. Il ne faut que 15 minutes au tax pour nous conduire au pied des pistes. Ici comme prévu, il y a de la pente et une dénivelé( conséquente, bref, de quoi nous faire saute de joie si la neige n'avait pas été balayée par le vent... Par dépit, on imagine les runs possible, avec un bon enneigement. Un peu abattus par ce coup du sort, nous décidons de poursuivre au Nord: à 160 km, il y aurait une petite station du nom de Sarihamis.

Je me réveille un peu en vrac, coincé entre des sacs et une portière, il me faut un certain temps avant de comprendre ce que je fais dans cette vieille R12 jaune traçant au milieu de nulle part au fin fond de la Turquie. Je regarde le paysage défiler mollement : c'est beau mais finalemen assez monotone si ce n'est les croisement: assez banzâi avec d'énormes camions qu roulent à fond et semblent ignorer notre voiture.. A intervalles réguliers, nous passons devan des tanks. Ce sont des casques bleus que notre chauffeur salue à coups de klaxon et de signes de la main. La lumière rasante du soir vient colorer les collines de mauve rose qui se mele harmonieusement au blanc et blue glacé des hauts plateaux.

La quatrième dimension

L'arrivée à la station se fait a la tombée de la nuit dans de semi-sommeil. Nous nous traînons jusqu'à la réception de l'hôtel où une nombreuse présence féminine a quelque peu réveillé Seb. Avec Marco, on regarde le plan des pistes pour voir où peut arriver le superbe télésiège quatre places débrayable qu'on a aperçu dans le halo des phares. L'hôtel semble désert mais le réceptionniste parle un français presque parfait. En fait, l'hôtel est gavé de Français, Anglais, Allemands, Américains mais pas vraiment des rideurs, plutôt des techniciens en armement ! Eh oui, forcément, quand tu vends des chars ou d'autres merdes du style, tu n'envoies pas un mode d'emploi à la traduction approximative à des militaires analphabètes. Un bien curieux comité d'entreprise avec lequel nous n'aurons aucun rapport. L'ambiance hyper guindée du restaurant où s'affaire un bataillon de serveurs au maintien trop de, la musique hallucinante de ringardise et l'éclairage jaune confèrent à cette salle trop çirande, une atmosphère un peu lourde, à la Enki Bilal. Mais finalement, c'est aussi ça un trip...

OOoooouuuhhhh !

Ne sachant qui des chiens ou des loups hurlent le plus tort sous notre fenêtre, nous préférons tomber dans un sommeil! sans retour. Le lendemain matin, si le temps est maussade, la neige a l'air assez bonne. Étant les seuls clients de l'hôtel et par conséquent de la station, il nous faut parlementer un bon moment pour obtenir l'ouverture du télésiège. Pour la première fois de notre vie, nous avons une station pour nous.

On enchaîne les runs en quête des meilleures contre-pentes. Ici aussi, la forêt est magnifique et assez ouverte pour offrir un choix de descentes variées. Après une dizaine de passages, les mecs du télésiège nous font comprendre que c'est fini pour aujourd'hui... A moitié dégoûtés, on met au point une stratégie différente pour le lendemain. On est avec des militaires ou pas ? Moyennant finance, le responsable de l'hôtel nous lâche deux skidoos. Nous voilà donc autonomes. Le terrain, toujours plutôt flat pour te ski, s'avère parfait pour les motos neige, à condition de ne pas se planter car quelle galère pour bouger ces engins une fois enterrés sous la neige ! Au retour, surprise : le boss de l'hôtel a fait venir une équipe pour faire un sujet sur le freeride ! Business is business, partout autour de la planète. Du coup, nous fûmes traités avec beaucoup d'égard les deux derniers jours... La Turquie en snow-trip n'est pas à conseiller pour un rideur hard-core. Pas de problème pour trouver de la neige, en revanche, il est plus délicat d'en trouver en pente... Mais quand le ski devient davantage une excuse pour un voyage aux portes de l'Orient, alors c'est du bonheur. Comme à chaque fois que l'on

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